Avec Bureaucratie David Graeber met à nu un aspect rarement étudié du capitalisme : l’inflation des procédures administratives. Et prend comme d’habitude le contre-pied du discours dominant : moins que l’hypertrophie de l’État, c’est l’extension infinie du champ économique qui explique l’existence des comptables, juristes, certificateurs… « Il faut mille fois plus de paperasse pour entretenir une économie de marché que la monarchie absolue de Louis XIV », écrit-il.
Fidèle à son esprit aventureux et rétif à tout principe arbitraire, l’anthropologue de profession démonte de manière singulière l’un des plus grands enfumages de notre présent politique : au lieu de libérer les énergies et les esprits créatifs, le néolibéralisme dominant n’est que le triomphe macabre d’une technologie bureaucratique, c’est-à-dire d’une scène politique et sociale définie par le contrôle, la surveillance et la menace.